La Baron de Creully sauvé par la dame de Courseulles

 

D’après « Les contes de la plage » de Bernard Hue

Au cœur du bourg de Courseulles, en Normandie, un vieux château veille, noble vestige du temps de François Ier. Son haut pavillon, sa terrasse ouvrant sur les champs et la mer infinie, ont vu naître bien des secrets. C’est là que grandit Odette, fille unique du comte d’Ecquevilly, ancien soldat revenu vieillir en paix après mille combats. Orpheline de mère dès sa naissance, elle fut élevée avec tendresse par dame Blanche, sa vieille tante rêveuse, et par un chapelain au cœur doux.

Odette, belle comme un matin de printemps, avait la grâce dans l’âme et la lumière dans les yeux. On la voyait chaque jour, glissant de maison en maison, semant des aumônes et des sourires. On l’appelait « la bonne damoiselle ». Hélas, une fée oubliée au berceau lui réservait d’autres épreuves...

Quand son père mourut soudainement, la jeune fille, alors âgée de seize ans, se retrouva seule au château. Les longues veillées, peuplées de récits chevaleresques, nourrissaient ses rêves. Au fond de la cheminée, elle croyait voir se dessiner les visages de preux chevaliers, et dans l’écho du silence, le pas lourd des épées d’antan.

 Depuis deux ans, Odette menait une existence paisible, rythmée seulement par les visites épisodiques de ses cousins de Creully. Une nuit de décembre, alors que le vent soufflait violemment et que la pluie battait les vitres, un cavalier demanda refuge au château. Il s’agissait du comte de Mautravers, élégant et mystérieux, qui fit aussitôt impression sur Odette. Dame Blanche, toujours prompte à voir dans chaque rencontre les signes d’un destin chevaleresque, en conclut que ce visiteur n’était autre qu’un noble venu demander la main de sa nièce.

Le comte, courtois et séduisant, se montra rapidement assidu, et, après un séjour prolongé, obtint la main d’Odette. Le mariage fut célébré par le vieux chapelain, et la jeune fille devint comtesse de Mautravers, comblée d’illusions et d’espoir.

Mais le conte de fées tourna vite à l’inquiétude. Le comte, qui avait promis de l’emmener à la cour puis en Touraine, ne tint pas parole. Prétextant les suites d’un duel, il retarda sans cesse le départ. Bientôt, il multiplia les absences nocturnes, partant à cheval accompagné de son écuyer. Le mystère s’épaissit lorsqu’un matin, il revint seul, menant à la main le cheval de son compagnon. Peu après, il fit venir un nouvel écuyer, un soudard brutal et grossier, dont la présence troubla les habitants du château.

Odette, déjà profondément troublée par les escapades nocturnes de son mari, s’inquiétait de plus en plus. Attendant un enfant, elle se réfugiait dans la prière, espérant que la naissance de ce petit être ramènerait la tendresse perdue. Désemparée, elle confia ses doutes à Jean-Marie, le fidèle domestique de toujours. Celui-ci partageait ses soupçons et promit de l’aider à découvrir la vérité.

Odette lui raconta comment, après avoir exprimé sa peine au comte, elle n’avait récolté que des reproches secs et une fin de non-recevoir. Convaincue que quelque chose de grave se tramait, elle fit appel à Jean-Marie, certain qu’il serait son allié le plus sûr dans cette sombre affaire. Le vieil homme accepta sans hésiter, prêt à tout pour servir celle qu’il considérait comme sa propre fille. Il lui promit de faire la lumière sur les activités nocturnes du comte avant la fin de la semaine.

 Le lendemain, Jean-Marie se fit plus vigilant encore. Il rôdait aux abords des pièces, tendait l’oreille aux conversations et, avec un sourire affable, tenta de gagner les faveurs de l’écuyer, allant jusqu’à lui faire goûter un cidre d’une rare qualité. Mais le rusé Normand n’y gagna rien : cinq jours passèrent, et il n’avait pas avancé d’un pas.

« Que faire ? » murmurait-il en son for intérieur. « Ah ! si j'avais encore mes jambes d’autrefois, je les suivrais à la trace, et leurs chevaux n’iraient pas assez vite pour me distancer ! »

Un soir, voyant les préparatifs de départ du comte et de son serviteur, Jean-Marie alla se tapir dans l’écurie, dissimulé sous un tas de paille. Il était neuf heures lorsque les deux hommes y entrèrent.

        — Quels chevaux prenons-nous, Mautravers ? demanda le comte.

        — Ceux du château, la course sera brève. D'ailleurs, les nôtres auront à tirer dur demain soir. Le rendez-vous est fixé au carrefour de Rye, et de là…

Jean-Marie n’en entendit pas davantage, les hommes quittaient l’écurie.

À l’aube, il partit en secret, traversant champs et haies pour gagner l’endroit désigné. Il repéra un fourré dense, à l’angle de deux chemins, et s’y dissimula, prêt à tout entendre. Les heures passèrent, longues, pesantes. Il doutait déjà, s’apprêtait à partir, lorsqu’un bruit de sabots attira son attention. Deux groupes arrivaient par des chemins opposés. Bientôt, une dizaine de cavaliers se retrouvèrent au croisement.

Ils étaient jeunes, bien armés, montés sur des chevaux nerveux.

         — Le capitaine est en retard, lança l’un.
         — Il se ramollit depuis qu’il a trouvé le confort, ricana un autre.
         — Il profite, rétorqua un troisième, car bientôt, il faudra déguerpir…

Mais soudain, un hennissement lointain se fit entendre.

          — C’est lui !

Deux cavaliers arrivèrent. Jean-Marie tendit l’oreille.

           — Bien, tout le monde est là, dit le chef, Gastechair, des nouvelles de Chavannes ?
           — Oui, capitaine. Il m’a chargé de vous dire : « Rien n’a changé. Dans trois jours, le comte de Sillans et sa clique repartent à la cour. Une fois partis, plus rien ne nous retient. Je suis las de jouer les espions déguisés en laquais à Creully. »

            — Parfait, répondit le capitaine. Écoutez, ce soir, nous attaquons le convoi de l’évêque de Bayeux, sa nièce, et quelques seigneurs qui regagnent leur demeure. C’est notre dernier coup ici. Ensuite, nous vidons le château de Courseulles et adieu la Normandie.

            — Emmenez-vous la comtesse ? plaisanta un bandit.
            — Qu’en ferais-je ? Une potiche inutile. Et si elle m’entrave trop…

Ils partirent au galop. Quand le silence revint, Jean-Marie restait là, pétrifié. Tout s’éclairait : Odette, douce et fière Odette, était l’épouse d’un bandit ! Ce même homme qu’on croyait noble, n’était qu’un criminel. Il parlait même d’éliminer sa femme. Jean-Marie sentit la colère lui rendre force et courage. Il courut sans relâche, gagna le château à minuit, et pénétra par la petite porte.

Il voulut d’abord prévenir Odette, mais recula au seuil de sa chambre, anéanti. Il s’assit, désespéré.

Une main douce se posa sur son épaule.

          — Jean-Marie, je t’ai vu partir… Entre.

Elle l’emmena dans sa chambre.

           — D’où viens-tu ? demanda-t-elle.

           — Du carrefour de Rye, balbutia-t-il. Mais je ne peux, je n’ose… Malédiction sur moi, sur cette tante imprudente qui l’a hébergé, sur ce jour funeste où il entra ici…

           — Jean-Marie, je t’en supplie… Parle. Je veux savoir. Je dois savoir.

Alors il parla. Il lui raconta tout. Odette s’écroula en pleurs.

            — Que faire, mon Dieu ? murmura-t-elle, anéantie.

            — Je vais prévenir votre cousin à Creully, répondit Jean-Marie.

            — Va… mais n’oublie pas… c’est le père…

Il partit aussitôt. Une heure plus tard, il était reçu par les gardes de Creully. Il parla longuement avec le comte. À l’aube, il était de retour. Peu après, Mautravers et son écuyer rentrèrent, confiants. Une heure plus tard, douze hommes d’armes s’arrêtèrent à la grille. Conduits dans la chambre, ils réveillèrent Mautravers.

             — Levez-vous, capitaine de Mautravers. Vous êtes attendu à Creully.

Les oubliettes du château de Creully.
Comprenant qu’il était perdu, Mautravers se tut, se vêtit et suivit les soldats. L’écuyer fut réveillé à son tour. Ils furent escortés hors du château.

Jean-Marie resta jusqu’à ce que le dernier cavalier disparaisse. Il leva les yeux vers la fenêtre d’Odette : les rideaux frémissaient.

Arrivés à Creully, Mautravers et ses deux complices furent conduits dans une aile oubliée du château. Une porte basse s’ouvrit… et sous leurs pas, le vide. Ils chutèrent dans les oubliettes. La porte se referma pour ne plus s’ouvrir.

Odette, accablée, ne vivait plus que pour l’enfant à naître. Quand il vint au monde, ce fut un garçon. Mais à peine né, sur ordre du baron disait-on, il fut emporté, et on n’entendit plus jamais parler de lui.

Deux ans plus tard, Odette se mariait avec le comte de Montbeillard, un vieil homme malade, qui accepta de lui rendre honneur et nom. Elle le soigna jusqu’à sa mort, puis consacra sa vie aux pauvres.


Le dindon du cabaretier des environs de Bayeux

 


Dans les doux environs de Bayeux, alors que la Mi-Carême se préparait à éclore comme une fleur au cœur du printemps normand, un cabaretier — homme jovial au ventre rond et au rire facile — avait acquis un dindon splendide, à la prestance royale et au plumage lustré comme la soie. Il rêvait déjà des festins qu’il inspirerait, des coupes levées à sa gloire, et des visages réjouis autour de ses tables.

Afin d’attirer les villageois vers son auberge fleurie, il conçut une idée qu’il jugea lumineuse : promener l’animal dans les rues, tel un prince au défilé, paré d’une pancarte vantant ses mérites. Il y inscrivit de sa main rustique, non sans fautes charmantes :

« Le dindon que voici sera promener par le village, à faim que chacun puisse voir cépate, ça ôteur, çà grosseur, ça graisse et sa kraite. Il sera rotti demein, il sera mangé à une eure, le prix du diner est de 1 F, sans les zestras. — Il est défendu de toucher l’animal. »

l'orthographe du cabartier
Mais alors qu’il s’apprêtait à coller l’avis sur le noble volatile, le garde-champêtre de la commune entra, bottes crottées, moustache droite, et voix grave comme le tambour d’appel. Le cabaretier, honoré, posa son affiche fraîchement encollée sur une chaise, et servit deux verres de cidre pour trinquer à la santé de la République.

On parla des cultures, des filles à marier et des rumeurs de la grand-route. Puis, le garde-champêtre, repu de conversation et de boisson, repartit fièrement, le dos droit et le pas assuré.

Mais soudain, comme un frisson farceur dans l’air du village, une étrange agitation monta. Des rires, d’abord étouffés, s’échappaient des ruelles. Les enfants gloussaient, les femmes cachaient leur bouche dans leur tablier, et les hommes toussaient pour ne pas éclater.

Le fonctionnaire, étonné de tant de gaieté soudaine, fit halte chez l’instituteur, homme lettré et sérieux. Il entra, salua, mais à peine s’était-il tourné pour refermer la porte qu’un rire insolent éclata, cristallin, incontrôlable.

Alors il comprit.

L’affiche. La colle. La chaise.

La sentence comique était scellée : la pancarte vantant le dindon avait trouvé refuge sur la partie la plus exposée — ou la plus intime — de son uniforme. Et partout où il allait, il arborait fièrement, sans le savoir, ce message publicitaire.

Rougissant jusqu’aux oreilles, il se retourna vers l’instituteur :

— « Comment ? Personne ne m’a arraché cela ? »

Et l’instituteur, avec un calme ironique et un sourire mal contenu, répondit :

— « Non, certes. L’affiche défend de toucher l’animal. »


Marie Mesnil, la patronne du "Grand 8" était de Villiers le Sec (Creully sur Seulles).


En décembre 1914, le « Grand 8 » aérien, attraction foraine allemande,  a été saisie sur l’ordre du procureur de la République de Nantes. Tout le matériel se trouvait chargé sur des camions.
A la suite de cette saisie, la première chambre du tribunal civil de Nantes avait rendu un jugement ordonnant le sé­questre du « Grand 8 » aérien.
Si le gérant, ou plutôt l’exploiteur en France de cette attraction de foire avait déclaré être de nationalité suisse, l’entre­preneur, lui, est allemand, et son maté­riel aussi.

Le propriétaire était bien suisse et sa femme était de Villiers le Sec dans le Calvados comme nous le montre l'article ci-dessous paru dans la presse régionale du centre de la France.

1858 - Le chien du maçon de Bazenville

        À la fin de l’année 1858, dans le paisible village normand de Bazenville, un homme du nom de Greffin vivait des jours simples, rythmés par les travaux de la pierre. Maçon de son état, il avait été chargé d’une mission particulière : démolir un vieux château à Vienne, bourg voisin. Une tâche ardue, mais noble, qu’il accepta avec courage.
        Pour se rendre à Vienne et veiller sur son chantier, Greffin avait emmené avec lui un fidèle compagnon, son chien, un animal vigilant qu’il utilisait comme chien de garde. Le chien n'était pas un simple animal de compagnie, mais un allié indispensable sur le terrain, veillant nuit et jour sur les outils, les matériaux, et parfois même sur la sécurité de son maître.

        Cependant, au retour de cette mission, un événement inattendu vint troubler sa tranquillité. En 1859, la commune de Bazenville, où Greffin résidait, le taxait pour ce chien. Faute d’avoir déclaré la bête en temps voulu, son nom fut inscrit sur le rôle des contribuables à la triple taxe, celle que l’on réservait aux chiens non déclarés.
        Greffin, homme de bon sens, trouva cette décision absurde. Son chien n’avait pas gambadé dans les prés de Bazenville, ni même aboyé une seule fois dans ses ruelles cette année-là ! Il avait été en mission, tout comme lui, à Vienne, et il n’avait guère été qu’un outil de travail, au même titre qu’une truelle ou qu’un marteau.
Il présenta donc sa requête au préfet du Calvados, qui, en février 1860, reconnut l’injustice de la situation et lui accorda une décharge de la taxe. Pourtant, la commune de Bazenville, inflexible, refusa d’effacer son nom du registre des contribuables. L’affaire remonta alors jusqu’au Conseil d’État.
        Là, dans les hautes sphères de l’administration impériale, l’Empereur Napoléon III et ses conseillers examinèrent le cas. Le rapport fut clair : Greffin ne devait pas être imposé. Le chien avait été utilisé dans le cadre d’une mission professionnelle en dehors de la commune ; il n’avait donc pas à figurer sur les rôles fiscaux de Bazenville. L’erreur venait de là, et elle fut corrigée.
        Le 28 juin 1860, justice fut rendue : la plainte obstinée de la commune fut rejetée. Le chien de Greffin, humble et discret compagnon de labeur, était enfin lavé de tout soupçon fiscal.

Le 2 mai 1855, sous le règne de Napoléon III, une loi est votée pour instaurer une taxe sur les chiens.
Cette taxe est fixée par chaque commune et varie entre 1 et 10 francs par chien.
Le montant dépend du type de chien : les chiens de compagnie ou de chasse (1re catégorie) paient plus que ceux qui aident les aveugles ou gardent les troupeaux et les maisons (2e catégorie).
Les propriétaires doivent déclarer leurs chiens à la mairie.

1786 - Sainte-Croix-Grand-Tonne - LOUIS XVI et la future mère.

 

    Le 22 juin 1786, Louis XVI, vêtu de son habit royal, traversait la Normandie pour rejoindre Cherbourg. Sa mission était noble : inspecter les travaux de la digue, témoin de l’ambition du royaume. Mais ce voyage allait être bien plus qu’une simple visite technique.

    Sous un ciel légèrement voilé, Louis XVI avançait sur les chemins normands, le cœur léger mais attentif aux moindres détails de ce premier voyage. À Caen, il fit une brève halte, puis reprit la route jusqu’à Sainte-Croix-Grand-Tonne, où l’attendait une auberge chaleureuse, havre de répit pour le souverain et ses compagnons.

Le Roi arrive à l'auberge de Sainte-Croix-Grand-Tonne.

    Alors qu’il savourait un repas simple mais délicat, une jeune fille, les yeux embués de larmes, s’approcha timidement. D’une voix tremblante, elle lui confia son désespoir : un amour brisé par les exigences d’une dot insuffisante, un avenir assombri par une grossesse solitaire. Touché par la sincérité de son récit, le roi posa doucement sa main sur la sienne et, sans hésitation, lui fit remettre cinq cents livres. Une lumière nouvelle brilla dans les yeux de la jeune femme, et, en s’éloignant, elle murmura une bénédiction sincère.

    Louis XVI reprit son chemin, le vent jouant doucement avec les pans de son manteau. Après avoir traversé Bayeux, sur une route bordée de champs fleuris, une vieille femme attendait, son regard fixé sur le cortège. Alors que les gardes tentaient de l’éloigner, elle éleva la voix, son cri déchirant le calme du matin. Intrigué, le roi s’arrêta et lui fit signe d’approcher. Elle leva les yeux vers lui, une prière silencieuse dans le regard. Dans un geste empreint de bienveillance, Louis XVI lui offrit une embrassade sincère, rappelant l’affection naturelle d’Henri IV pour son peuple. Sans un mot de plus, il ordonna qu’on lui remette une aide financière, puis reprit son chemin sous le regard ému des témoins de cette scène.

    Les routes de France murmuraient désormais les récits de ces instants de générosité, gravant dans la mémoire des hommes l’image d’un roi proche de son peuple, dont chaque geste était empreint d’humanité.

Le sieur de Juaye et le privilège de Saint Romain.

St Romain à Rouen

Le privilège de saint Romain permettait au chapitre de la cathédrale de Rouen de gracier chaque année un condamné à mort le jour de l’Ascension.  Son origine fait partie de la légende de Saint Romain.
Saint Romain, évêque de Rouen au temps de Dagobert (629 - 639), décida de dompter un monstre des eaux, la Gargouille, qui désolait les marais de la rive gauche. Il demanda un compagnon et seul un condamné à mort accepta. Saint Romain passa son étole au cou de la Gargouille, et elle fut menée à la ville, tenue ainsi en laisse par le condamné à mort. Celui-ci fut gracié. Dagobert (ou son fils Clovis II) donna à l'évêque de Rouen Saint Ouen et à ses successeurs le privilège de gracier un condamné chaque année.


Gilles Baignart, un brigand du Bessin sauvé...

En l’an de grâce 1526, le chapitre des chanoines de la cathédrale de Rouen, dans un geste d’une clémence troublante, accorda le pardon à l’un des êtres les plus décriés de notre province qui toucha la fierté (châsse) de saint Romain. C'était le jour de l’Ascension, et pourtant ce fut un homme tombé bien bas que l’on releva : Gilles Baignart, seigneur de Juaye, village proche de Bayeux.

À vingt-quatre ans à peine, il était déjà chargé d’une réputation qui aurait fait rougir les plus endurcis. Si sa jeunesse plaidait en faveur d’une certaine indulgence, elle glaçait aussi le sang : car si jeune, et déjà aussi corrompu, aussi violent, aussi cruel. Originaire du diocèse de Lisieux, Gilles Baignart n’était plus, depuis longtemps, un simple jeune homme égaré. Depuis huit ans, il avait embrassé la vie d’aventurier, sillonnant la Picardie, franchissant les montagnes, au service du roi, mais surtout au service de la guerre et du pillage.

Juaye était sirué dans une enclage du diocèse de Lisieux dans celui de Bayeux

Les « aventuriers » – une milice sans foi ni loi – étaient redoutés comme des fauves. Une ordonnance royale de 1523 les dépeignait sans détour : voleurs, assassins, violeurs, dévastateurs de villages, fléaux des campagnes. Rabelais lui-même les peignait avec verve, saccageant récoltes, églises, fermes et bétails, n’épargnant ni riche ni pauvre.

Gilles Baignart était l’un d’eux, et il en incarnait la démesure.

Le démon s’éveilla dans sa propre maison. Lorsque sa mère, dame Marie de Courseulles, épousa en secondes noces un certain sieur de Chantelou, Gilles, à peine âgé de vingt ans, s’insurgea. Il accusa le nouveau couple de lui dérober l’héritage de son défunt père, et dès lors, ne cessa de les menacer et de les accabler. Un jour, à Port (Port en Bessin), non loin de Bayeux, il tendit une embuscade à un sergent royal venu lui porter un acte de sauvegarde obtenu par Chantelou. Gilles le blessa d’un coup d’épée, et le poursuivit avec rage jusqu’aux portes de Caen.



Mais ce n’était qu’un prélude.

Peu après, il revint en force, escorté de soudards – Raoulin Baudet, Henry Langloys, Jehan le Chevalier et bien d’autres. Ensemble, ils assiégèrent la demeure de sa mère. Chantelou, barricadé dans une chambre, résista. L’arrivée providentielle de l’abbé de Mondaye et de voisins pieux apaisa les esprits. Chantelou et son épouse durent s’exiler à l’abbaye de Mondaye. Baignart, lui, prit possession de la maison de Courseulles.

Mais la justice ne l’avait pas oublié. Un décret de capture fut lancé. Une troupe de sergents fut envoyée. Baignart, épaulé de ses compagnons armés d’arquebuses et d’arbalètes, les repoussa jusqu’aux portes de Bayeux.

Puis, défiant toute loi divine ou humaine, il attaqua l’abbaye elle-même. Brisant les portes, il emporta deux charretées de blé, sans se soucier d’en connaître le véritable propriétaire. Dans la mêlée, un homme d’église fut blessé du pommeau de son épée, un moine fut jeté dans le fumier.

Le témoin de ces sacrilèges, interrogé par les autorités à la demande de l’abbé, n’eut pas longtemps à vivre. Trouvé dans le cimetière de Juaye, il fut frappé d’un coup d’épée en pleine poitrine. Mort.

Et pourtant… Baignart obtint une rémission, une grâce, sur une route au sud. Il se constitua prisonnier pour mieux faire valoir des lettres de clémence. Mais les officiers du roi les contredirent. Qu’importe : des gentilshommes du pays intercédèrent, et Baignart fut élargi, à condition de se représenter à la justice . Il s’y refusa.

Le brigand reprit ses méfaits. À l’Hôtellerie, près de Lisieux, dans l’auberge où pend une corne de cerf, ses valets, prétextant une chasse aux pies, massacrèrent les poules du village. Le lieutenant du vicomte, tenant audience ce jour-là, fit arrêter les chevaux de Baignart. Ce dernier répliqua en chef de guerre : avec une bande d’aventuriers, il chargea les villageois armés. Une centaine furent blessés, un mourut.


Le sénéchal de Normandie, alerté, envoya un prévôt des maréchaux, Floquet, accompagné de dix-huit archers. Baignart, prévenu, se rua sur eux à l’auberge de « L’Écu de France », dans les faubourgs de Bayeux. Il les blessa, les pourchassa jusqu’à la cathédrale. Floquet s’enfuit. En réponse, cinq cents hommes furent envoyés pour capturer l’insaisissable criminel. Mais Baignart s’était volatilisé.

Il tenta en vain d’obtenir la grâce royale. Ni ses amis, ni même le Vendredi Saint, ne purent fléchir le roi. En chemin, il tua un homme, Pierre Montrichard, pour une querelle liée à une ancienne maîtresse. À Blay, il marcha de nuit, sans lanterne. Le guet voulut l’arrêter. Il résista. Avec lui étaient plusieurs hommes de sang : Guillaume de Chantereau, fils de l’armurier du roi ; Le Petit Denys ; La Mote, laquais royal ; Henry, valet de Monseigneur de Saint-Pol. Ensemble, ils tuèrent un garde du nom de Desgranges.

Et ce n’était pas fini.

Au village de Longueraye, les habitants tentèrent de l’arrêter. Une femme, tenant un enfant dans ses bras, lui saisit les cheveux. En se débattant, Baignart frappa l’enfant, qui mourut deux jours plus tard.

À Bayeux, il força une prostituée, Guillemette Guendon, à le suivre. Elle refusa. Il la traîna de force dans une chambre, et abusa d’elle.

Enfin, avec la complicité de soldats logés chez lui, il facilita le viol d’une femme mariée, épouse d’un certain Jehan Viel, sous prétexte qu’elle aurait eu des rapports avec un prêtre. Viel s’enfuit, et sa femme fut livrée aux soldats. Ces soldats furent plus tard exécutés.

Mais lui… Gilles Baignart, l’homme que les chanoines de Rouen gracièrent, ce jour de l’Ascension… survécut.

Sources:
"Essais historique sur l'abbaye de Juaye-Mondaye" par le P. Godefroy Madeleine (1874)
 "Histoire du Privilège de Saint Romain" par A.Floquet (1833)

Creully - L'école et de grands souvenirs.

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1938 - La mobilisation générale à Creully dans la presse allemande

Septembre 1938

Emotion à Creully après une méprise des gendrarmes de la localité.
Ayant mal compris une communication  téléphonique, au lieu d'apposer l'affiche convoquant certains réservistes ont apposé celle de la mobilisation générale.

Vu dans la presse allemande

 

Mobilité énergétique à Creully

Les mesures de sécurité du gouvernement français ont été menées de manière exemplaire et dans un calme absolu. Il n'y avait qu'un seul endroit où il y avait une excitation considérable, mais cet endroit n'a pas une grande importance pour la France. C'est un tout petit village, la commune de Creully en Normandie près de Caen. Le gendarme du village, comme toutes les autres autorités, avait reçu l'ordre par téléphone de poser des affiches annonçant l'appel des réservistes. Dans son excitation, il a soit mal compris cet ordre téléphonique, soit confondu les différentes affiches de mobilisation qui étaient naturellement disponibles. Quoi qu'il en soit, les paysans de Creully apprirent le lendemain matin que la mobilisation générale avait été décrétée. Comme il se devait, ils se mirent immédiatement en route, avec leurs voitures et leurs chevaux, certains même avec leur bétail, comme l'aurait exigé une mobilisation générale. Ils arrivèrent en cortège fermé à Caen, où cela causa naturellement le plus grand émoi, et ils ne furent pas peu surpris d'être les seuls de toute la région à avoir obéi à l'ordre. La reconnaissance suivit bientôt, bien sûr, et les paysans de Creully repartirent, rassurés.

Autres articles sur le même sujet :

Septembre 1938 - Gendarmerie de Creully - Mobilisation Générale...

Creully sur Seulles - Creully à la "une" du Canard enchaîné en 1938

1758- Les milices garde-côtes de notre littoral - Retrouvez nos paroisses.

 

En 1757, en pleine guerre de Sept Ans (1756-1763), la surveillance des côtes françaises, notamment en Normandie, était une préoccupation stratégique majeure pour le royaume de France. À cette époque, il n’existait pas encore de corps unifié de « garde-côtes » comme on pourrait l’imaginer aujourd’hui.

La France est en guerre contre la Grande-Bretagne. Les côtes françaises sont donc sous la menace constante de raids ou de débarquements britanniques.

La Normandie, située en face des côtes anglaises, est particulièrement vulnérable. Les Anglais ont mené plusieurs incursions sur le littoral normand et breton pendant ce conflit.



Les moyens de défense côtière :

Les Milices garde-côtes

  • Créées dès le XVIIe siècle sous Colbert, elles sont composées de paysans et pêcheurs enrôlés localement, souvent sur une base obligatoire.
  • Ces hommes étaient organisés en compagnies réparties par paroisses ou communes littorales.
  • Leur mission : surveiller les côtes, signaler les navires ennemis et participer à la défense en cas de débarquement.
  • Ils n’étaient pas des soldats professionnels, mais avaient un entraînement sommaire et étaient équipés par l’État ou par leurs moyens.

Les Troupes régulières

  • Des détachements de l’armée régulière étaient aussi stationnés dans des villes comme Cherbourg, Le Havre, Granville ou Dieppe pour renforcer la défense.
  • Des batteries côtières (petits forts ou redoutes) étaient tenues par des artilleurs.

La Marine royale et service des classes

  • La Marine royale, basée notamment à Brest, pouvait intervenir au large mais avait un rôle plus stratégique.
  • Le système des classes mobilisait les marins pour la flotte de guerre, mais certains pouvaient être affectés à des missions côtières.
Les Milices garde-côtes de notre littoral :

Notons que notre province de Normandie était divisée en trois départements : Haute, Moyenne et Basse Normandie.




Juin 1858 - Dans nos cantons, le ciel comme une bête déchaînée.

 

Le mercredi 6 juin 1858 s’ouvrit sur un silence lourd, presque solennel. Bayeux et les terres paisibles du Bessin suffoquaient sous une chaleur accablante, comme si le ciel retenait son souffle, préparant en secret l’inexorable courroux de la tempête. L’air vibrait d’une tension muette, les feuillages étaient immobiles, et le moindre bruit semblait résonner à l’infini, suspendu dans une attente étouffante.

Puis, à l’heure où le jour commence à s’incliner, un fracas déchirant éclata. Le ciel s’ouvrit comme une plaie vive, vomissant d’un seul coup tonnerres, éclairs et flots furieux. La pluie s’abattit avec la rage d’un dieu offensé. En un clin d’œil, les rues se changèrent en torrents sauvages, indomptables, et les hommes, impuissants, regardaient l’eau engloutir les pavés, les seuils, les chemins familiers.

Mais la pluie n’était qu’un prélude.

Bientôt, le ciel, dans une furie plus grande encore, fit pleuvoir non plus de l’eau, mais des pierres de glace, énormes, brutales, d’une blancheur aveuglante. Elles s’écrasèrent sur les toitures, pulvérisèrent les vitres, éventrèrent les serres. Les jardins, jadis calmes et féconds, furent saccagés, comme passés au fil d’une invisible épée. Fleurs et légumes, dans un dernier soupir, se couchèrent sous les coups implacables. Même l’hirondelle, messagère du ciel, fut frappée net, son corps frêle brisé dans un ultime vol tragique.

Partout, les foyers pleuraient. Les ardoises jonchaient les sols, les vitres n’étaient plus que dentelles brisées, et des morceaux de plâtre pendaient aux plafonds comme les lambeaux d’un monde en ruine. On se murmurait dans Bayeux que jamais mémoire d’homme n’avait vu semblable désolation.

Et ce fléau ne s’était pas contenté de la ville.

Il s’était étendu, comme une bête déchaînée, sur les cantons voisins : Balleroy, Tilly, Ryes, Creully… Là, sur une terre labourée par les cieux, une femme âgée, humble gardienne de sa vache, fut frappée par la foudre. Elle s’effondra sans un cri, fauchée dans une solitude tragique. Sa bête, projetée comme une poupée par une main invisible, gisait plus loin, tremblante et muette, à jamais marquée.

À Creully, un glaçon gigantesque, large comme un poing d’homme, fut retrouvé : preuve muette de la colère des cieux. Et pourtant, dans cette mer de larmes et de décombres, une lueur : les récoltes, disait-on, n’étaient pas entièrement perdues. La nature, blessée mais vivante, semblait prête à se relever.

Mais les pommiers, eux, pleuraient déjà leur floraison volée, leurs branches nues tendues vers un ciel qui ne répondait plus.

Les épiceries des cantons de Creully et Ryes en 1891

Une publicité des années 1890, le chocolat Menier, dans les épiceries des cantons de Creully et de Ryes.

Canton de CREULLY
 

Canton de RYES


Creully sur Seulles - Cecil Newton, un de nos libérateurs de juin 44 est décédé

HOMMAGE A LUI

Le 3 juin 1944, Cecil Newton était l'un des nombreux jeunes hommes embarqués à bord d'un navire à Lepe Beach, dans le Hampshire.
Beaucoup ne devaient pas revenir. 
 Cecil Newton raconte:
"Ils ont mis en place un chapiteau avec des cartes et des instructions écrites sur ce qui allait se passer le jour J - mais ils n’ont pas donné le lieu exact, bien sûr.
Des rangées de tentes et de chars ont été livrées là-bas, au bas de la colline. Mon temps se passait à déballer les tentes et à préparer les chars pour l'action.
Le 3 juin, par une journée très ensoleillée, le sergent-major de l'escadron a marché sur les chars de débarquement avec son bloc-notes sous le bras.
Le soir venu, le temps était devenu affreux et nous étions retardés d'un jour. Nous avons traversé des conditions météorologiques extrêmement difficiles et sommes tombés très malades sur les plages du débarquement. "

Cecil et le 4 / 7ème Royal Dragoon Guards furent les premiers chars à débarquer sur Gold Beach à 7h20 le 6 juin 1944.

Le 6 juin 1944, 6483 navires, dont 4222 péniches de débarquement et cargos, transportèrent du sud de l'Angleterre trois millions de soldats avec deux millions de tonnes de matériel allant de la jeep à l'artillerie lourde de l'autre côté de la Manche.

Les 4e/7e Royal Dragoon Guards au camp Heveningham, Suffolk en 1943. ( Photo : newburytoday)
Opération "Overlord" était le nom de code de l'opération de débarquement dans son ensemble.

"Gold Beach" est le nom de la plage d'atterrissage où le 4ème / 7ème Royal Dragoon Guards, un régiment blindé aux racines traditionnelles de la cavalerie britannique, devait attaquer le mur de l'Atlantique de Hitler. "Nous étions tous bien entraînés et très tendus quant à ce à quoi nous attendre," rapporte Newton, "mais nous n’avons pas peur. Il ne faut pas oublier que nous étions tous très jeunes ... "

En route pour libérer Creully, la Normandie et la France...

Le 7 juin 2019, l’école primaire de Creully sur Seulles prend le nom de Cecil Newton. (photo : Ouest-France)

Cecil Newton 


Creully sur Seulles - Une légende méconnue : la Dame Verte

 

Par un soir d’automne où le ciel se nuançait déjà de cendre, Maître Pierre Josse, notable de Creully, détacha la longe de sa jument Cocotte, nouée à l’anneau de fer qui, depuis des générations, pendait au mur moussu de l’auberge du Bessin-Vert, à Bayeux. Dans un geste aussi coutumier que galant, il pinça le menton de la servante venue le reconduire jusqu’à sa carriole — geste auquel la jeune fille répondit d’une bourrade, mi-friponne, mi-méfiante — puis il se hissa dans son siège avec un grognement de vieux chêne, témoin de genoux qui ployaient plus qu’ils ne pliaient.


« En route, ma fille », lança-t-il d’un ton bonhomme, sans tolérer la moindre objection. Et Cocotte, créature docile à la conscience tranquille, s’ébranla sans attendre, les sabots résonnant sur les pavés humides.

La nuit, comme un rideau de velours criblé d’étoiles, tombait déjà lorsque Pierre Josse marmonna : « Eh, eh… v’là la nieut qui tumbe. J’devrais être d’r’tour. Sacré cru de Surtrain, y fait perdre le temps comme un sermon d’vicaire. »

Et tandis qu’ils atteignaient à peine les carrières d’Esquay, il fallut allumer les lanternes, dont les flammes tremblantes projetaient des ombres dansantes sur les haies.

Or, maître Josse n’était pas homme à goûter les trajets nocturnes, du moins sur ce chemin-là, entre Saint-Gabriel et Creully, où serpentait la cavée des Bourguay. Les anciens du pays y colportaient des histoires... de brume et de mystère. Ils disaient qu’à la source secrète de la fontaine Verrine, surgissait parfois une vapeur étrange, diaphane et féminine, qui s’élevait lentement comme un songe, voilée de bruine, frôlant les feuillages dans un murmure de soie. On l’appelait la Dame Verte.


Elle longeait les fossés, s’approchait des attardés, accrochait aux carrioles une présence que nul ne savait chasser, sinon à coups de peur ou de prières. Mais elle n’était ni spectre ni démon : plutôt une âme égarée ou un désir ancien.

Ce soir-là, à l’instant même où la vallée cédait la place à la plaine, elle se montra.

Légère, presque irréelle, elle surgit de l’herbage, effleurant les balises de sa robe comme une pénitente traverse une nef. Elle avançait, mains tendues, non en conquérante, mais en suppliante. Et Cocotte, tout à trac, reçut un coup de fouet involontaire quand Pierre Josse fit obliquer la carriole, saisi d’une peur qui n’avait rien de chrétien.

Mais l’apparition s’approcha encore, posa ses doigts effilés sur les montants de la voiture, comme si elle attendait qu’on l’invite. Ni menace, ni cri, une simple présence, douce et brumeuse, pareille à un rêve trop vrai.


Alors, maître Josse, rassemblant ce qu’il lui restait de courage et de souffle, osa parler :
« Mais enfin, que voulez-vous ? »

Point de rire moqueur, point de cliquetis d’enfer. La Dame, d’une voix douce comme un ruisseau entre les pierres, répondit simplement, un mot unique, comme une goutte sur une feuille :
« Naître. »

Et elle s’évanouit. Juste ainsi. Un souffle. Un soupir.

Pierre Josse, stupéfait, resta figé. Non pas glacé de peur, non. Plutôt gagné par un étrange apaisement. Il n’avait pas fui. Il avait écouté. Et, pour la première fois, la Dame avait parlé.

La source Verrine

Des années plus tard, on perça les terres de Creully, et l’on découvrit la source Marie — sœur profonde de Verrine et de Pelvey — née d’une nappe artésienne oubliée sous les ruines féodales. On sut alors, trop tard pour Josse mais juste à temps pour la légende, que ces sources avaient une âme. Une conscience douce et discrète, qui attendait depuis des siècles, tapie sous la terre, de voir enfin la lumière.

Car certaines eaux ne veulent plus murmurer dans l’ombre : elles veulent naître.
Et parfois, elles viennent le demander.