Son livre |
Marcel Madelaine a vécu le dernière guerre et a mis sur papier ses obervations et ses ressentiments pour en faire un livre.
A la Médiathèque de Mémmoriall de Caen j'ai retrouvé le manuscrit. En voici deux extraits relatant la commune de Creully.
DIMANCHE 16 JUILLET 1944 -
Cette nuit, j’ai dormi comme un loir. Je crois rêver, ne
plus entendre le bruit des éclatements d’obus, de la canonnade, enfin la
tranquillité, je n’ose y croire, la guerre pour moi est finie.
Au petit-déjeuner : thé - petits gâteaux - fruits. C’est impeccable, ensuite c’est un médecin anglais qui vient faire mon pansement ; dans ce domaine-là aussi ils sont bien organisés. Il me place sur le mollet un pansement complet, autocollant, d’une seule pièce, puis série de piqûres. Derrière lui arrive un officier qui parle un français correct. Il ne peut nous garder ici et nous propose deux solutions ; soit on nous évacue par avion en Angleterre, soit on nous dirige sur BAYEUX où il pense que les Services hospitaliers de la ville peuvent nous accueillir. Après réflexion, j’opte pour BAYEUX, ce sera plus facile pour retrouver la famille.
Marcel Madeleine (encerclé) |
Ce midi, le déjeuner est aussi copieux qu’hier soir et
aussitôt après, en route, des ambulances militaires nous attendent à la porte
et au revoir CRESSERONS. A côté de moi, se trouve une bonne sœur caennaise,
elle est amputée d’une jambe. Les routes sont aussi encombrées qu’hier c’est
impensable la quantité de matériel qui roule, aux carrefours nous attendons
parfois près d’un quart d’heure pour passer, à REVIERS, c’est pire encore.
Avant d’arriver à CREULLY, il y a dans les champs sur des hectares du matériel
de toute sorte, chars, camions, canons, hangars, campements militaires. A
Creully, nous sommes arrêtés pendant plus d’une heure sur la place du pays, il
y a une animation comme sûrement cette petite bourgade n’en avait jamais connu.
Il n’y a aucune destruction par ici. Quelle chance ils ont eu. Enfin nous
partons pour BAYEUX, première ville française libérée.
Lorsqu’après avoir quitté La Bon Sauveur dans des conditions dramatiques le 15 juillet 1944, l’ambulance anglaise qui nous conduisait à BAYEUX s’arrêta une bonne heure sur la place du Marché de CREULLY. J’étais loin de me douter que je rencontrerais le Général MONTGOMERY deux ans plus tard, dans ce même petit bourg à la limite du Bessin où mon frère et moi-même, à la demande de Monsieur Ed. PAILLAUD, Maire de Creully, avons créé une petite entreprise d’électricité générale.
Recevant en JUIN 1946 le
Général Montgomery (devenu entretemps MARECHAL), Madame de DRUVAL, propriétaire
du Château de CREULLET, où MONTY installa son P.C. très vite après le
débarquement, nous demanda de remettre en état l'installation électrique dans
deux chambres destinées au Maréchal et à son Aide de Camp, ce qui fut fait.
A peine les deux hommes
étaient-ils rentrés dans leurs chambres respectives pour y passer la nuit,
qu’une explosion retentit dans celle du Maréchal. Aussitôt, son aide de camp,
pensant à un attentat, appela au secours les gendarmes qui étaient de garde à l’extérieur
du Château. Branle-bas de combat, tout cela pour peu de chose ; il n'y avait
pas eu d'attentat, mais tout simplement deux ampoules électriques que nous
avions fournies, avaient explosé et c'est ainsi qu'allant les remplacer, mon
frère et moi fîmes connaissance du Général MONTGOMERY qui était en petite tenue
- caleçon long et chemise de nuit - . Il avait très bien pris la chose et en
riait (chose très rare paraît-il). Très en verve, il nous raconta que quelques
jours après avoir installé son P.C., vers le 10 ou 12 JUIN 1944, un matin très
tôt, il faisait une promenade à pied en solitaire, derrière le château, quand
soudain deux soldats allemands surgirent d’un petit bois proche… ; ces
soldats voulaient simplement se rendre, ils n'avaient pas mangé depuis une
semaine. Montgomery ajouta qu'il fut sûrement le seul Général d’Armée à faire
tout seul deux prisonniers ennemis en pleine bataille.
Dans la magnifique entrée du Château, il y avait un grand tableau supposé être le portrait de Guillaume le Conquérant et le Général Montgomery se comparait à lui en disant : ” Guillaume est allé conquérir l'Angleterre et moi descendant d'un de ses compagnons, je suis venu reconquérir la Normandie.