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Creully - Histoire et description par M.Fortier

Monsieur Maurice Fortier, notaire et Maire de la localité de 1961 à 1966; avec Monsieur Jacques Pougheol, a écrit la partie concernant Creully dans un fascicule historique et architectural.
Je reproduis ci-dessous les trois pages concernées.
Cinq châteaux normands entre Bayeux et Caen . Etude historique et architecturale de cinq châteaux : Creully ( Maurice Fortier et Jacques Pougheol ) ; Fontaine-Henry ; Lantheuil ( marquis de Naurois-Turgot ) ; Brécy ( Jacques de Lacretelle , de l'Académie française ) ; Creullet ( Bernard Leconte d'Hymouville ).
Si vous me faites une demande par mail, je vous ferai parvenir une copie de ces trois pages par courrier postal. Ne pas oublier d'indiquer votre adresse postale.

Partageons nos documents sur Creully sur Seulles (Creully - Saint Gabriel-Brécy - Villeirs le Sec)

 Je suis à la recherche de documents sur Creully sur Seulles (Vieilles cartes postales - Vieilles photos - Documents et objets sur l'histoire de cette localité et de ses entreprises et artisans etc.).

C'est avec plaisir que j'offrirai 3 magnets des plus anciennes photos de Creully à ceux qui me prêteraient de tels documents.
D'avance merci.


Creully sur Seulles - 31 mai 1769 - Visite de chantier en l'église paroissiale de Saint-Gabriel Brécy

 Le 31 mai 1769, « Pierre Fontaine, architecte, demeurant à Pontoise » et « François de Cussy, archi­tecte, demeurant en la paroisse de Sainte-Croix-sur- Mer », chargés par l’abbaye de Fécamp de dresser un devis estimatif des réparations qui lui incombaient dans les édifices dépendant du prieuré de Saint-Gabriel, procédèrent à une visite du chœur de l’église parois­siale de Saint Gabriel. 

Ce devis, je l’ai exploré aux Archives Départementales du Calvados.Un procès-verbal très détaillé fut rédigé ; en voici des extraits :

« Nous avons visité le chœur de ladite église, lequel contient 34 pieds de longueur, compris le sanctuaire, sur 23 pieds de largeur dans œuvre, et 16 pieds de hauteur de costière sous égouts, couvert en grosse ardoise, avec un pignon nu levant. Cedit chœur est éclai­ré de deux croisées avec panneaux de vitres au Midi et trois au Nord. Le sanctuaire séparé par trois marches en pierre de taille, avec une balustrade en bois sur la dernière manche, ledit sanc­tuaire de 10 pieds et demi de longueur, l’autel et contre table en pierre de taille, décoré de deux colonnes torses de chaque côté, d'architecture d’ordre composite, avec piédestaux, base, chapiteaux et fronton dans le milieu le tabernacle et les gradins en menui­serie, au-dessus duquel est un tableau peint sur toile représentant Notre Seigneur sur la Croix. Cedit chœur et sanctuaire pavé en pavé de pierre de plusieurs échantillons et huit tombes en pierre, voûté et lambrissé en plein cintre avec planches de sapin et tringle sur les joints. Le tout est fermé sous le milieu de l’arcade séparant la nef par un mur d’appui en pierre, au-dessus duquel est une balustrade en bois, avec porte d’entrée dans le milieu à deux vantaux, dont le bas est à panneaux et le haut garni de balustre; au-dessus de ladite porte et dans le milieu est un Christ ; au-devant de la balustre est un banc pour le clergé fort ancien ; mais comme M. le Curé nous a déclaré avoir fait un mar­ché avec un menuisier à Bayeux pour faire un autel en menuiserie  et des stalles, et aussi un tableau pour mettre dans le milieu dudit autel, le tout aux dépends du trésor, que ledit autel, tabernacle, tableau et stalles sont faits et prêt à poser, pourquoi nous n’avons pas fait état de celui actuel    

« Ensuite nous avons fait la visite du clocher, lequel est situé sur le mur de l’arcade séparant la nef d’avec le chœur, et que (sic) le chœur ne comprend que la moitié de l’épaisseur dudit mur, lequel est supporté par dessous par trois arcs en pierre de taille, et sous celui du milieu est placé le Christ, pourquoi nous estimons que ledit clocher doit être à la charge dudit sieur prieur pour moitié avec les habitants, et pourquoi nous en avons fait la visite, ainsi que de la tour, dans laquelle est pratiqué l'escalier servant à y  monter, ainsi qu’à la charpente sur le chœur et contient 5 pieds 6  pouces carrés dans œuvre, construit en pierre de taille, terminé en pyramide par le haut d’environ 10 pieds de hauteur avec quatre croisées en face du beffroi... »


Départ de l'escalier



Arrivée de l'escalier

Creully sur Seulles - Novembre 1932 - Gabrielle-Yvonne-Madeleine est baptisée à Saint Gabriel.


Dans le journal diocésain, "La semaine catholique" du 6 novembre 1932, un article relatait la cérémonie de bénédiction d’une cloche installée dans le petit béffroi de l'église de Saint-Gabriel.

" La paroisse de Saint-Gabriel possède un célèbre prieuré, fondé au XIe siècle par un seigneur de Creully, en faveur de l’abbaye de Fécamp ; de ce prieuré subsistent encore, outre un magnifique chœur roman du XIe siècle, d’autres constructions un peu plus récentes que leur propriétaire actuel, M. Fauchier-Delavigne, a trans­formé avec infiniment de goût en une belle école d’horti­culture...

Il y a d’autre part, à Saint-Gabriel, une importante minoterie et de nombreuses exploitations agricoles ; la popula­tion s’y est accrue depuis quelques années au point qu’il a fallu construire des maisons nouvelles et dédoubler l’école publique devenue trop petite. Ce n’est donc pas ici « la terre qui meurt », mais bien la terre qui revit, parce qu’elle sait unir au respect des bonnes traditions anciennes le souci de s'adapter aux progrès modernes.

Mais l’une des caractéristiques les plus frappantes de notre paroisse, c’est la bonne entente générale qui y règne. Cette union cordiale, qui fait un des charmes, de Saint-Gabriel, est due pour une part à l’esprit judicieux et avisé de ses habitants qui savent que la discorde et l’intrigue nuisent toujours en fin de compte à ceux qui les ont fomentées. Mais elle provient aussi de ce que tous ici sont, directement ou indirectement, pénétrés de cet esprit de paix, de justice et de fraternité que le Christ est venu enseigner aux hommes,

C’est en ces termes que, le 27 octobre1932 , M. André Delacour, conseiller référendaire à la Cour des Comptes et maire de Saint- Gabriel, présentait la commune qu’il a su placer au premier rang du progrès social, à S. Exc. Monseigneur Picaud, venu pour bénir une nouvelle cloche. Et le distingué magistrat municipal, après avoir décrit en une page inspirée du plus pur esprit chré­tien le rôle de la cloche, rappelait comment, le beffroi de la vieille église menaçant ruine, on avait dû interrompre les sonne­ries. La commune l'ayant remis à neuf, on avait alors songé à remplacer l'une des cloches fêlées, dont l’acquisition a pu être faite, grâce à une souscription paroissiale ouverte par « le dévoué, vaillant et distingué pasteur », M. l’abbé Frayard. Et l’orateur, écartant la perspective d’un nouveau tocsin de guerre, souhaitait pour terminer, l’avènement de cette bienheureuse Paix dont le Christ est venu apporter aux hommes la formule infaillible, mais que les hommes rechercheront en vain, tant qu’un trop grand nombre s’obstineront à demeurer sourds aux enseigne­ments de l’Evangile.

Monseigneur Picaud remercia avec ce tact, cette élévation de la pensée et cet art de la parole qui le caractérisent et sont déjà si appréciés dans le diocèse. Puis, l’on se rendit à l’église bientôt remplie d’une foule débordante, aux premiers rangs de laquelle on remarquait M. Engerand, député, et M. le comte d’Oilliamson conseiller général. C’est alors que le Pontife, assisté de M. le vicaire général Lemercère et de M. le chanoine Lefrançois, doyen de Creully, qu’entourait un nombreux clergé, procéda à la bénédiction rituelle de Gabrielle-Yvonne-Madeleine.

Après que M. l’abbé Frayard eut présenté à son évêque ses paroissiens de Saint-Gabriel et dit leurs mérites et la satisfac­tion qu’ils donnent à leur desservant, Monseigneur Picaud, dans un langage élevé et nourri de fortes pensées, exposa le symbolisme de la cloche, tira la leçon de cette belle liturgie et marqua la satisfaction qu’éprouvait son cœur d’Evêque.

La néophyte de bronze qui avait pour parrain M. Robert Delacour, fils du maire de Saint-Gabriel, et pour marraine Mlle Julien fille du maire de Brécy — commune rattachée pour le culte à Saint-Gabriel — ayant reçu l’investiture chrétienne, prit place sans retard dans sa prison aérienne, pour y remplir avec ses compagnes son rôle d'animatrice fidèle de la vie religieuse.

      Après la cérémonie, Mgr Picaud fit dans la paroisse le tour de l’évêque, si nous osons dire, et d’un évêque particulièrement averti de la beauté artistique : il admira le vieux prieuré, félicita M. Fauchier-Delavigne de ses généreuses initiatives, loua M. Delacour de son zèle pour le bien social, marqué par de si beaux résultats, et félicita Saint-Gabriel d’avoir su choisir et garder un maire si distingué et dévoué.

Le souvenir que tous garderont de cette journée vraiment réconfortante en fera l’une des plus belles dates de l'histoire de Saint-Gabriel."

Je rappelle que l'association des 3 clochers de Creully-sur-Seulles souhaite réaliser une journée du clocher à Saint Gabriel, le lundi 24 mai 2021 (Lundi de Pentecôte). "Ouvrez votre clocher aux habitants !"


Creully sur Seulles - Eté 1970 - Un chantier de jeunes au prieuré de Saint Gabriel-Brécy.

Le prieuré de Saint-Gabriel-Brécy est le cadre d'une en­treprise particulièrement intéres­sante : reconstruire un bâtiment dans le style du Prieuré.

150 jeunes passent leurs va­cances dans la commune Bas- Normande grâce à l’Association Cotravaux (études et chantiers). Cette Association placée sous l’égide du premier ministre est la plus récente et. la plus impor­tante des organisations de ce genre. Elle regroupe 200 chan­tiers comme celui de Saint-Ga­briel et plus de 400 jeunes.

Depuis le mois de juillet, Belges, Italiens, Tchèques, Espa­gnols, Danois, Allemands, Polo­nais et Français ont trouvé le moyen de découvrir cet esprit constructif nécessaire à une telle entreprise. S’ils ont dû résoudre de nombreux problèmes, ils ont aussi connu des joies, surtout celle de se découvrir et d’amé­nager l’espace humain dans le­quel ils se trouvent.

Ce chantier entre dans le ca­dre de l’expansion du Centre horticole. Il abritait 30 élèves en 1930 et à la rentrée pro­chaine, ils seront près de 140. Si le nombre des élèves a aug­menté sans que les aménage­ments suivent cette progression, on a donné, cette année, le départ d’un programme impor­tant : création de dortoirs, salles de classes, sanitaires, salles d’eau et réfectoire. Réalisations coûteuses : 12 000 de nos francs actuels. La première tranche en cours s’élève à 3 000 F. Elle est réalisée en collaboration avec l’Entreprise Jeanne et Henin qui trouve en ces jeunes des « ou­vriers » n’ayant aucune con­naissance sur les méthodes de construction mais faisant preuve d’une grande volonté.

Ils sont conseillés par M. J.J. Deseze, architecte, qui dirige la construction d’un bâtiment de 20 mètres sur 8 où sera aménagé le réfectoire.

Outre le travail, on a mis sur pied diverses activités de loi­sirs : atelier-photo, sports, visites dans la région. Deux soirées de chansons courtoises avec Jean Belliard ont été organisées au mois de juillet.

Le dernier groupe arrive cette semaine et participera à une journée amicale avec les jeunes de Creully, dimanche 30 août. Au nombre de ces 150 garçons et filles qui travaillent béné­volement mais sont logés par le centre horticole, se trouvent Alain et Hervé Fauchier-Delavigne, vice-président et trésorier du centre.

Ces maçons vacanciers travaillent pendant leurs vacances pour offrir aux élèves du Prieuré la rentrée.


Creully - Lantheuil - L'aérodrome 1944

L'aérodrome de Lantheuil-Creully fut achevé le 21 juin 1944. Il s'étend sur 190 hectares répartis sur les communes de Lantheuil, Creully et St Gabriel-Brécy. La piste qui s'étend sur 1200 mètres de long et 80 mètres de large accueillera le 143e Wing. Les aviateurs Canadiens du 143e Wing de la Royal Canadian Air Force ont élus domicile sur cette base baptisée « base B9 de la R.A.F ».

Le 27 juin 1944, les Escadrilles 438, 439 et 440 sont affectées à la base improvisée à Lantheuil, équipés d'avions de chasse et de bombardement de marque Typhoon. Après un séjour de deux mois à Lantheuil, les escadrilles procèdent de l'avant pour finalement aboutir, à la fin de septembre, à Eindhoven, dans les Pays-Bas.
Ci-dessous (en rouge) la piste.

Un office religieux sur l'aérodrome.

La plaque commémorative.

Creully sur Seulles - 1847 - Découverte d'un jardinier du Bourgay (Creully)



Le 9 du d'août 1847, le soleil faisait des efforts pour percer les nuages, un jardinier bêchait la terre de son courtil ayant le projet de planter les pôriaux (poireaux) d’hiver. Nous sommes au hameau du Bourgay, commune de Creully. Ce hameau se trouvait entre le chef-lieu de canton du Calvados et la localité de Saint Gabriel-Brécy.
Le jardinier se baissant pour retirer une racine de liseron ramassât une rondelle qu’il prit pour un bouton de fort diamètre. Il l’essuya avec le chiffon qui dépassait de sa poche et se rendit compte de son erreur ; c’était une pièce.

Il la montra rapidement à un homme de Creully qui se renseignât et on eut plus tard grâce à un spécialiste, Monsieur Lambert la description de ce petit trésor du Bourgay.
Très-belle pièce d'or aux types de Philippe de Macédoine. Ce statère, d'un travail très remarquable, pourrait passer, aux yeux de beaucoup de personnes, en raison de sa bonne exécution, comme étant de coin grec, et cependant, après un examen sérieux, nous déclarons qu'il n'en est rien, et que, malgré l'intégrité de l'inscription grecque du nom de Philippe, correctement écrit en toutes lettres, on doit voir dans cette curieuse monnaie l'une des premières imitations gauloises des statères d'or de la Macédoine. Cette belle monnaie, que chacun pourra étudier facilement, puisqu'elle fait aujourd'hui partie des collections de la Société des Antiquaires de Normandie, servira de point de départ pour étudier et comparer l'habileté des Gaulois dans les premières imitations des espèces macédoniennes
La découverte du Bourgay fut considérée comme utile, en ce qu'elle offre un moyen de comparaison certain pour reconnaître les espèces de ce genre qui peuvent se rencontrer sur le sol de notre pays. La simple inspection de cette monnaie, en la comparant à une pièce de coin grec, ne peut permettre aucun doute.

Informations trouvées dans un mémoire de la Société des Antiquaires de Normandie.

Creully (Creully sur Seulles) Le temps du patronage.

Il est loin le temps où nous allions au patronage avec les sœurs oblates, rue d'Arromanches. Des enfants de Tierceville et de Saint-Gabriel-Brécy nous rejoignaient.
Rappelez-vous copains, copines, des jeudis après-midi. Les boulangers offraient le pain et les sœurs ou nos parents faisaient les confitures.

Les bâtiments et la cour.
Jusqu'en 1972, dans la scolarité française, le jeudi était jour de congé tandis que le mercredi était travaillé.

39 - 45 - La vie à Saint Gabriel-Brécy (Creully sur Seulles) pendant la guerre.

Voici un article rédigé pour la presse canadienne par Maurice Desjardins, correspondant des journaux de langue française.
Avec les troupes canadiennes en France le 27 juin 1944.
Il y a en France des milliers de pe­tits villages qui attendent en frémissant leur libération.
Ils ont hâte de respirer l'air pur, d’échapper enfin à l’odieuse occupation qui empoisonne leur existence depuis quatre ans


Pour les deux cents habitants de Saint-Gabriel, cette attente est ter­minée. La libération de ce hameau du département de Calvados est en effet un fait accompli et les braves paysans, qui habitent ses maisons anciennes, ont repris goût à la vie.
Situé dans la plaine de Caen, en­tre Creully et Bayeux, le village de Saint-Gabriel est le prototype du village français. Sa population vit d’élevage et cultive le blé et autres céréales. Elle est aussi fière de son cidre et de son camembert.
Le curé, M. I ’abbé Frayard qui dessert aussi deux autres petites pa­roisses, est un mutilé de la grande guerre.  Le maire M. Delacour est le châtelain, mais il habite Paris où il est conseiller à la Cour des comptes.
M. Noël, le percepteur des impôts habite Saint-Gabriel depuis dix ans. C'est d'après ses propos fidè­lement recueillis au cours d’une entrevue, que sera reconstituée ci-après la phase douloureuse de l'occupation boche.
"Nous avons vu en Juin 1940 ar­river les réfugiés de Paris ; des gens qui avaient été mitraillés et qui transportaient des matelas sur des voitures. Puis, ce furent les réfugiés du Nord et de la Seine Inférieure.  Lorsque les allemands franchirent la Seine, nos gens partirent n’importe où vers l'ouest ou vers le sud.  C'était une véritable panique, ils partaient avec des brouettes, des voiturettes d'enfants ou tout ce qui pouvait leur tomber sous la main.  On ne se battit pas à Saint-Gabriel.
Le 17 juin nous avons vu passer les derniers anglais qui étaient dans des camions et se dirigeaient vers Cherbourg. En passant, ils nous disaient au revoir.
"Trois jours plus tard les pre­miers allemands arrivaient dans de petits chars blindés. Tout le monde restait à la maison, car les alle­mands avaient déjà une réputation de bandits.
"L'armistice nous soulagea quel­que peu mais l’avenir n'était pas rose, car nous savions que les bo­ches occuperaient tout le pays et nous croyions I ’Angleterre finie également.
"Au début de Juillet, ils sont venus réquisitionner la minoterie de M. Roussel pour la kommandantur, une succursale de la kommandantur principale, qui était située à Creully. A deux kilomètres de Saint-Gabriel.  Les Allemands étaient fu­rieux lorsqu’ils s'apercevaient que les maisons qu’ils réquisitionnaient étaient vides. Ils disaient que nons avions eu peur et pour se venger, ils pillaient tout et expédiaient nos meubles et nos vêtements en Allemagne.
"Quoiqu'ils eussent à cœur de paraître corrects, les jeunes Hitlériens étaient une terreur pour nous et tous scandalisaient nos bonnes gens car ils pratiquaient le nudisme intégral.
"Le personnel de la Kommandantur était souvent changé, sans doute pour éviter qu’il ne se crée des amitiés trop fortes dans le village. Une des premières pro­clamations fut d’interdire sous peine de mort d'écouter la radio anglaise mais personne ne se gêna pour écouter les émissions de la B. B. C.
"Nous avions le droit de voya­ger, mais comme nous étions en zone interdite, les français des provinces d’intérieur n'avaient pas le droit de nous visiter. Le secrétaire du maire fabriquait de fausses cartes d'identité que nous envoyions par courrier à nos amis de Paris pour leur permettre de venir nous voir.

"Seuls les véhicules servant au ravitaillement ou aux services médicaux pouvaient obtenir de l’essence qui était distribuée au compte-goutte, mais on se dé­brouillait car de gros stocks d'es­sence avaient été dissimulés et puis on en chipait dans les gara­ges des boches.
"Il fallait décliner à des com­missions la quantité de blé, de pommes de terre et de foin que nous avions en culture mais nos cultivateurs faisaient leur propre pain et le meunier fabriquait clandestinement une quantité de farine pour la consommation exclusive des français. Le cidre ne manquait pas et nous en avons toujours bu du cidre car il faut une occasion extraordinaire pour que nous buvions du vin.
"Pour les fins de leur propagande, les allemands avaient re­cours à des ruses diaboliques. Un jour Ils nous, réunirent et deman­dèrent à ceux qui voulaient des pommes de terre de lever la main droite. Tout le monde leva la main naturellement et alors un photographe nazi prit un instan­tané du geste et la photographie fut montrée en Allemagne pour prouver que les paysans normands avaient pris l'habitude du salut nazi.
"Au cinéma où passaient des films allemands doublés en fran­çais, il était interdit de manifes­ter mais lorsqu'apparaissait la binette d'Hitler, tout le monde se mouchait avec bruit ce qui ren­dait les allemands furieux, mais que pouvaient-ils faire.
"Ce qui nous manquait surtout c'étaient des chaussures, des textiles, des articles de toilette et des conserves.
"Les Allemands faisaient mine d'acheter à bon prix ce dont ils avaient besoin mais ce n'était qu'une autre méthode de pillage car Ils payaient avec de la mon­naie sans valeur. Les allemands avaient de très maigres rations et comme leurs supérieurs ne leur défendaient pas de faire appel aux ressources du pays Ils allaient réquisitionner des centai­nes de litres de lait et si le fermier refusait, ils allaient traire les vaches eux-mêmes. Dans les hôtels, ils louaient les meilleures chambres et c'était la France qui payait tout. Une voiture alleman­de ayant écrasé un gosse, les frais d'inhumation devinrent des frais d’occupation.
"Les personnes trouvées sur la rue après le couvre-feu de onze heures étaient envoyées au poste de police où les hommes ciraient les bottes des soldats tandis que les femmes raccommodaient les chemises.
"L'an dernier un avion allié fut abattu près de Bayeux. Ses occupants, tués sur le coup, furent enterrés non loin de là. Les habi­tants des alentours voulurent as­sister aux funérailles, mais les allemands arrêtèrent tous ceux qui se trouvaient là et obligèrent par la suite, les hommes à plan­ter des pieux dans les environs en guise d'obstacles contre d'au­tres atterrissages possibles de l’aviation des Nations Unies."
M. Noël me dit aussi que dans la région on ne s'attendait pas du tout à ce que les Alliés fissent leurs premiers débarquements sur la côte normande en raison des rochers sous-marins de la côte du Calvados.
Le six juin, jour de l'invasion, il me conte, vers les quatre heu­res du matin, il contempla de sa fenêtre les bombardements aé­riens qui précédèrent les débar­quements alliés. Les trois pre­miers soldats britanniques entrè­rent à Saint-Gabriel à six heures du soir, le même jour.
Au cours de l'après-midi, toujours d'après M. Noël, les soldats allemands s'occupèrent fébrile­ment à préparer leur retraite.
En terminant, M Noël se fit l'écho de ses concitoyens en me disant combien ils étaient tous heureux que les Alliés fussent en France, et, aussi que par miracle ou presque, leur village eut été à peu près épargné par les bombardements alliés.