Les deux moulins: à farine et à huile.
Projet d'un deuxième moulin, il permettra la fabrication d'huile.
(Document retrouvé aux archives départementes le 19/02/2007)
Reproduction du texte ci-dessusLes Moulins de CreuIIy sont situés dans la commune de ce nom, arrondissement do Caen, département du Calvados, sur la rivière de Seulles. Cette usine, construite à grands frais, il y a plusieurs années, et montée par M. Corrége, célèbre mécanicien de Paris, est en pleine activité. Le moteur hydraulique, d'une puissance considérable, met en jeu neuf paires de meules, qui peuvent écraser par an quarante mille hectolitres de blé, et produire vingt-quatre mille quintaux métriques de farine. Ce résultat est confirmé par l'expérience, et la clientèle toute créée, dont le gérant fait apport à la Société, assure le déboucher de cette grande fabrication.
Pendant environ huit mois de l'année, depuis le mois d'octobre jusqu'au mois de mai, la force de la chute d'eau dépassant les besoins du moulin à blé, la partie surabondante est perdue. II y a donc là une richesse à recueillir. Aussi serait-ce une excellente spéculation que de placer à côté moulin à blé existant déjà, un autre moulin à fabriquer l'huile, qui recevrait le mouvement de l'excédant des eaux de la chute.
On sait quelle importance ont pris et prennent chaque jour, dans le département du Calvados, la culture du colza, le commerce et la fabrication des huiles. Cette importance, pour la seule matière première, a atteint, en 1854-1855, 25 millions de francs. Aussi le marché de Caen, pour les graines et l'huile, se place-t-il au premier rang.
Située au centre de la culture du colza, et dans le voisinage de Caen, l'usine projetée réunit toutes les conditions de succès. La facilité de s'approvisionner de graines chez le cultivateur même, et de vendre les tourteaux dans le lieu même où s'en fait la plus grande consommation, annule la majeure partie des transports.
D'un autre côté, la proximité du petit port de Courtilles, permettant d'établir le charbon de terre rendu à Creully au même prix que le paient les usines de l'intérieur de la ville de Caen, on participera au mérite de la position de ces dernières; aussi pour profiter de l'avantage incontestable que présente la fabrication de l'huile pendant les mois d'août et de septembre, époque des basses eaux, devra-t-on joindre au moteur hydraulique une machine à vapeur qui pendant ces deux mois seulement remplacera la chute d'eau devenue trop faible.
Toute garantie est donnée que les frais de construction du moulin à huile, y compris les bâtiments et machines pour fabriquer 3,000 kilos d'huile par jour, ne dépasseront pas 100 mille francs, et n'atteindront pas probablement 80 mille francs. De plus, le directeur gérant fait apport à la Société de la promesse de vente du moulin à blé avec toutes ses dépendances immobilières et de la chute d'eau pour 130 mille francs. Il a coûté primitivement plus du double.
Ainsi, sur 500 mille francs dont sera formé le capital social, 230 mille francs seront convertis en propriétés immobilières et 270 mille francs seront employés au fonds de roulement.
L'appréciation du bénéfice à retirer d'une telle entreprise, faite dans les conditions les plus ordinaires et avec les suppositions les plus modérées, conduit à promettre aux actionnaires un revenu d'au moins DIX POUR CENT de leur capital.
En effet, la mouture d'un hectolitre de blé produisant on moyenne un profit de 1 fr.50 à 2 fr., c'est rester au-dessous de la réalité que de fixer à 70 mille francs le profit brut de la mouture de quarante mille hectolitres. Les comptes de frais de fabrication, tenus dans les années précédentes, confirment que les frais généraux, y compris les intérêts du capital de 250 mille francs applicable au moulin à blé, ne dépasseront pas 45 .mille francs.
Le bénéfice net du moulin à blé sera donc de 25 mille francs. Quant au moulin à huile, pendant huit mois de fabrication, il produira au moins, à raison de 25 ou 30 barils par jour, un total de 6.500 barils, sur lesquels le profit brut est estimé de l2fr. à 13fr. par baril, année commune, tandis que les frais généraux ne dépassent pas 8 francs. Pendant la campagne de 1854-1855 la prime de fabrication a souvent dépassé 20 francs !
Ce sera donc, sur la fabrication de l'huile, un bénéfice net de 25 à 30 mille francs. En le portant seulement à 25 mille francs, et l'ajoutant aux 25 mille francs produits par le moulin à blé, on aura pour bénéfice net, sur l'entreprise entière, une somme de cinquante mille francs par an.
Sur cette base, et d'après les statuts, le dividende assigné à chaque action de 500 francs sera de 25 francs, et comme en dehors de ce dividende chaque action aura reçu 5 p. 100 d'intérêts, soit 25 francs, le revenu total de chaque action sera de 50 francs, soit bien DIX POUR CENT du capital. Peu d'entreprises sérieuses en dehors de celles qui, en leur qualité de créations imaginaires, ou de jeux de bourse, promettent des dividendes de 50 ou 60 p. 100, peuvent offrir d'aussi beaux résultats. Aussi le directeur gérant, en voulant garder la direction et en souscrivant le premier des actions, donne-t-il la preuve de la confiance qu'il y apporte. Il a la certitude morale que celle des souscripteurs ne sera pas davantage trompée par le succès.