Creully (Creully sur Seulles) La fromagerie Paillaud.

Merci à Marie-Claude pour cette photo de la fromagerie.


Frédéric Bossé, photographe écossais, nous offre son regard aérien sur le château de Creullet (Creully sur Seulles).


A la différence du château de Creully, dont les murailles et les tours encore debout, ne représentent qu'une faible partie de la forteresse féodale, c'est seulement à l'époque moderne que Creullet, son satellite, a atteint le développement sous le­quel il se présente à nos regards. 
 Creullet a  une origine assez ancienne. Après avoir longtemps constitué une simple ferme, immédiatement rattachée au château de Creully. Creullet fut, à l'époque de Philippe Auguste constitué en fiefferme, c'est-à-dire assujetti au paie­ment d'une redevance perpétuelle en faveur du trésor royal. On le désignait alors sous le nom de Fief-le-Comte au hameau de Creullet.

Grâce à Frédéric Bossé, que je remercie, je vous présente son regard aérien de cette belle demeure.



Un document de 1551 sur la Maladerie de Creully (Creully sur Seulles).

Suite à l'article précédent sur la Maladerie (Maladrerie) de Creully, je vous présente le plus ancien document sur ce lieu que j'ai trouvé à la Médiathèque de l'Architecture et du Patrimoine à Charenton-le-Pont. Il date de 1551.

Creully (Creully sur Seulles) - La maladerie

De nombreux ouvrages indiquent qu'une Maladrerie se situait sur les terres de Creully.
Voici son emplacement.Seule la structure d'une ancienne éolienne nous indique où se situait la maladrerie.
La Maladrerie (ou Maladerie)

Une croyance populaire admet que les lépreux ayant pris pour patron saint Lazare supposé mort de la lèpre et dont le nom fut changé en celui de saint Ladre, furent à cause de cela, appelés Ladres et que de là sont venus les noms de ladrerie, maladrerie, lazaret.
Des temps hébraïques aux premiers siècles de notre ère, il n'existait pas de léproseries proprement dites, bien que, à cette époque reculée, les législateurs aient pris à l'égard des malheureux lépreux des mesures ayant pour but d'empêcher la propagation de la maladie.
Avec l'extension que fait la lèpre aux neuvièmes et dixièmes siècles, les léproseries deviennent si nombreuses que toute ville, toute bourgade même de peu d'importance avait son refuge. D'après l'historien Mathurin Paris il en existait 2 000 environ en France.
Les maladreries étaient toujours éloignées des habitations et il était difficile aux personnes du dehors d'y pénétrer, excepté le jour de Pâques.
Avec les procédés et l'ignorance de ceux qui étaient chargés de l'examen des lépreux, il n'est pas douteux qu'il y avait dans ces maladreries d'autres malades que des lépreux. Tous ceux qui étaient porteurs d'une affection de la peau ressemblant aux manifestations dé la lèpre, tous ceux qui étaient atteints de variole étaient séquestrés dans ces léproseries. Il y avait aussi des vagabonds et des paresseux qui, sans nulle crainte de la contagion et désireux de vivre sans rien faire, simulaient la lèpre pour être admis dans ces maisons. Il est vrai que les moyens de reconnaître la lèpre étaient absolument primitifs.
Lépreux, gravure du 13ème siècle
Une fois la maladie bien ou mal constatée, l'official diocésain prononçait la séparation, quelle que fût la situation sociale du malade, et faisait publier le jugement au prône de l'église paroissiale. Le dimanche suivant le curé en surplis et en étole et précédé de la croix et du bénitier, allait à la porte de l'église où devait se trouver le lépreux revêtu d'une robe noire, il l'aspergeait d'eau bénite et, après lui avoir assigné une place séparée dans l'église entre deux tréteaux, il célébrait une messe du St-Esprit avec l'oraison pro infirmis.
Après la messe, le lépreux était conduit processionnellement dans la cabane préparée pour lui dans la maladrerie voisine, sur le toit de cette cabane on jetait un peu de terre du cimetière en prononçant ces solennelles et touchantes paroles Sis mortuus mundo, vivus iterum Deo. Le prêtre récitait alors les litanies et donnait successivement au malade les objets suivants, après les avoir bénits: une cliquette (notam ou crépitaculas), des gants (chisotecas), une panetière (peram), puis il lui faisait les défenses suivantes, ainsi résumées par les chroniqueurs de l'époque :
" De ne plus entrer dans les églises, moulins, fours ou marchés, ni de se trouver en assemblée du peuple.
" De ne jamais laver ses mains, ni chose aucune qui soit à son usage, dans les fontaines, rivières ou ruisseaux qui servent au public, lui enjoignant que, s'il veut puiser de l'eau pour sa nécessité, il se serve de son baril ou de quelque autre vaisseau propre à cet effet.
" De n'aller déchaussé hors de la maison ni sans habit de lépreux (robe noire et voile pour la bouche) et ses cliquettes afin d'être reconnu d'un chacun.
" De ne toucher quelque part qu'il se trouve aucune chose qu'il voudra acheter, sinon avec une verge ou baston.
" De n'entrer aux tavernes ni autres maisons, sous quelque prétexte que ce soit, lui enjoignant que, s'il veut acheter ou recevoir du vin que l'on lui voudra donner, il le face mettre en baril.
" De ne connaître charnellement autre femme que la sienne.
" De ne répondre sur les chemins à ceux qui l'interrogeraient, s'il n'est hors et au-dessous du vent, de peur qu'il n'infecte les passants
" De ne point passer par les chemins étroits, pour éviter les rencontres contagieuses.
" Que s'il est contraint en voyageant de passer l'eau, de ne point toucher les pieux et autres instruments qui servent à cet effet sans avoir premièrement mis ses gants.
" De ne toucher aucunement les petits enfants, ni leur donner aucune chose, ni à quelque autre personne que ce soit.
" De ne plus manger ni boire en compagnie, sinon de lépreux comme lui. "
Le prêtre le consolait ensuite et l'exhortait en lui disant: " vous ne vous fâcherez pas d'être séquestré des autres, d'autant que vous aurez votre part à toutes les prières de votre mère sainte Eglise, comme si personnellement étiez tous les jours assistant au service divin avec les autres... Seulement prenez garde et ayez patience, Dieu demeure avec vous."
Extraits de documents issus du site du Centre Hospitalier de Corbie (Somme)
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Creully (Creully sur Seulles) - La maligne influence

Voici une histoire racontée dans notre contrée avec l'intention de mettre en garde les gens con­tre certains hommes qui, par leurs discours, essayent de les attirer.En traversant à cheval une forêt qui conduit à Creully, un paysan est arrêté, non loin de Lantheuil et de la maladerie, par une vieille femme qui lui demande de la prendre en croupe.
— Qui es-tu ? interroge le paysan creullois.Je suis la Peste, répond la vieille femme.


Effrayé, le paysan fouette sa bête qui fait un saut. La vieille le rattrape :
— Pourquoi fuir ? dit-elle au paysan. Crois-tu que je n'arriverai pas sans toi à ton village. J'y arriverai plus tard, voilà tout. Sois donc intelli­gent et donne-moi asile ; en échange, je te pro­mets de ne point t'atteindre, non plus qu'aucun des tiens.— Monte, dit le paysan.On se met en route.
Vingt pas plus loin, le paysan s'arrête :
— Si tu voulais me rendre heureux, dit-il à la vieille, tu épargnerais aussi un tel et un tel.
— Je les épargnerai, répond la vieille, nouvelle faveur accordée. Cela continue si bien que, à l'en­trée de Creully, la vieille ne devait plus frapper que dix individus.
Ce jour même, trente personnes étaient atteintes. Le paysan court chez la Peste.
— Tu es une infâme, lui dit-il, tu n'as pas tenutes promesses : trente personnes sont déjà mortes.
— J'ai tenu mes promesses, répond la vieille ; trente personnes sont mortes, c'est vrai, mais dix sont mortes du mal et vingt de la peur.Moralité : n'ayez pas peur de la maligne influence.

Creully (Creully sur Seulles) - Les " tags " d'hier.... sur l'église.

 Un graffito, des graffiti
"Inscription, dessin griffonnés à la main sur un mur" nous dit le Petit Larousse. Pour la plupart gravés sur les murs des églises, les graffiti marins constituent des ex-votos correspondant à une demande de protection ou à remerciement suite par exemple à un sauvetage après un naufrage.

Le trois mâts

Juin 1680 - Meurtre à Creullet (Creully sur Seulles)

Creullet (B.Geoffre)

Le mercredi 26 juin 1680, sur les minuits, sont entrés par les fenêtres, dans une  maison de Creullet deux hommes.  Ils se dirigèrent vers  la chambre en haut de l'escalier, était  couché Guillaume Anbery, procureur de madame de La Bindelière. Ils l'ont assassiné, dormant, de cinq coups de serpe, dont il est mort le jeudi quatre juillet sur le midi, et le lendemain inhumé dans la chapelle de Creullet, en  présence des sieurs curés de Villiers et Crépon. Ils pénétrèrent dans  la chambre de Madame de La Bindelière, qui était couchée, et lui demandèrent  la bourse avec un marteau à boucher, la menaçant de la tuer si elle criait. Elle dit aller quérir de l’argent , et se sauva dans la chambre de ses filles et cria, et les larrons fuirent.  
On en soupçonne Marin Richard dit La Rivière, qui avait servi  le sieur de La Bindelière, et Beauregard,  le maire du Manoir ou de Ryes, et un autre.

Informations trouvées dans le rapport de l'archiviste du département sur le service des archives départementales, communales et hospitalières : [exercice 1893-1894]

La laiterie Paillaud de Creully (Creully sur Seulles)- 1963 - Une nouvelle unité de fabrication

Une nouvelle unité de fabrication de lait condensé.
La laiterie Paillaud se trouvait dans les bâtiments situés rue d'Arromanches, celle qui mène au bief de la Seulles.

 



Creully (Creully sur Seulles) - Le cheval de Saint Martin changé en jument..

Le fait ci-dessous s'est passé en 1876
Un cheval changé en jument.
Vous connaissez l'antique légende de Saint Martin et de son manteau. Un jour, le charitable Saint rencontre un pauvre homme qu'un hérétique venait de dépouiller. Le mécréant n'avait laissé pour tout vête­ment au pauvre que son turban.
C'était assez pour éviter un rhume de cerveau ; mais trop peu pour se préserver d'une fluxion de poitrine.
Saint Martin, sans hésiter se dépouilla de la moitié de son manteau, et en couvrit l’homme qu'il sauva ainsi d'un enrouement certain.
La légende du cheval est plus moderne, et, par suite, moins connue.
Au-dessus du portail de l'église de Creully un artiste du pays avait sculpté avec assez de bonheur le patron de l'endroit, saint Martin et son cheval.
Rien n'y manquait.
Saint Martin avait son chapeau, son man­teau et des éperons; sa monture, un vé­ritable étalon, était harnachée et ferrée.
Tout le monde était d'accord pour trouver sans reproche ce petit chef-d'œuvre.
Seules, trois vieilles filles se signaient chaque fois qu'elles passaient devant le saint et sa monture.
On se perdait en conjectures sur ce qui pouvait motiver leur tristesse, lorsqu'on apprit, que les trois demoiselles s'étaient rendues en pèlerinage chez le sculpteur...
Et en falsifiant les textes, lui avaient prouvé que saint Martin avait toujours eu à son service une jument et non un cheval.
L'artiste, convaincu, a retranché ce qui offusquait tant les vieilles filles.
Et voici pourquoi le saint Martin de Creully, en opposition avec tous les saints Martin du monde, est monté sur une ju­ment et non sur un cheval.

Creully sur Seulles - Les croquis de Charles-Edouard Lambert (1794-1870).

Charles-Edouard Lambert (1794-1870) a été conservateur de la bibliothèque de Bayeux et  membre de plusieurs sociétés savantes. 
Il a sillonné notre région avec des carnets où il reproduisait des détails sur de nombreux monuments normands. Ces carnets se trouvent à la Bibliothèque de l'Institut National d'Histoire de l'Art (I.N.H.A.).
En les feuilletant, j'en ai extrait les pages ci-dessous:
Le château de Creully
La chapelle du prieuré de Saint-Gabriel
L'église de Villiers-le-Sec


Creully (Creully sur Seulles) - Mort à l'arsenic

Creully - Journal de Bayeux
Le 3 juillet 1904, vers 8 heures du soir, M. Joseph M. , 35 ans, cultivateur à Cully, se rendait à Creully, chez M. Vasnier, pharmacien, et lui demandait 25 paquets d’ar­senic de 1 gramme chacun, pour un de ses chevaux qui était malade et ajouta qu’il ve­nait de la part de M. Piédou, vétérinaire qu’il venait de rencontrer, mais que ce dernier n’ayant sur lui ni papier ni crayon, n’avait pu lui donner l’ordonnance.

M. Vasnier hésita d’abord, mais connaissant bien le client, n’hésita plus et lui remit les paquets demandés, après avoir eu soin de coller sur le tout une étiquette portant en lettres rouges : « Usage vétérinaire. »
M partit et, arrivé au lieu-dit les « Qua­tre Chemins », près du calvaire de Creully, il s’approcha d’une meule de foin, s’y arrêta, absorba le contenu des paquets et passa la nuit en cet endroit.
Le lendemain matin, plusieurs personnes s’approchèrent de lui et lui donnèrent à boire. Vers 3 heures du soir, M. Piédou, venant à passer, fut mis au courant et, s’étant appro­ché de la meule, constata que le malheureux venait de rendre le dernier soupir.
M. vivait en mauvaise intelligence avec sa femme et s’enivrait souvent. Son cadavre a été reporté à son domicile.

Creully sur Seulles - Deux clichés inédits.

Deux nouvelles photos dans ma collection. Elles ont été prises vers 1900.
La première représente la place du marché de Creully.
La seconde, le bas de la localité au pied du château. Nous remarquons que les piliers de droite ressemblent à ceux du château de Creullet qui se trouve un peu plus loin.


1838 - La farine du moulin de Creully (Creully sur Seulles) . un produit de grande qualité.

USINE ÉTABLIE A CREULLY PAR M. LE COMTE DE MARGUERIE
POUR LA MOUTURE DES CERÉALES.Le moulin de Creully , établi en 1838, sur la SeuIIes, d'après les procédés les plus nouveaux , avec une chute d'eau de plus de dix pieds, peut écraser, avec les six pavés de meules qu'il fait mouvoir, de quatre-vingts à cent vingt hectolitres de froment par vingt-quatre heures; et les prix élevés obtenus depuis son établissement par ses produits sur les places de Rouen, le Havre, Honfleur, témoignent de leur bonne qualité. On doit s'étonner de ne pas voir la place de Caen figurer d'abord, comme le débouché le plus naturel des farines de Creully. Elles s'y vendent également bien, mais en fort moindre quantité, les boulangers de cette ville ayant conservé presque tous l'ancienne manière de pétrir. La majeure partie des con­sommateurs n'ayant pas d'objet de comparaison , s'en contente, et les étrangers s'étonnent seuls de la différence qu'ils remarquent entre le pain blanc de Caen et celui des villes citées plus haut, dont le prix, du reste, est constamment plus élevé.
Ceci explique comment une industrie si appropriée au pays a été si longtemps à s'y établir, bien qu'elle fut récla­mée par le sol et la nature de sa production. Un petit nombre de communes voisines approvisionnerait au be­soin l'usine de Creully, indépendamment des grandes ressources d'importation qu'elle possède par sa position géographique.
Ces avantages ont frappé quelques spéculateurs de Caen, et un nouveau moulin, mu par une machine à vapeur, vient de s'y élever. On peut donc espérer qu'une sage émulation, qu'une rivalité bien entendue entre ces deux établissements, amèneront d'heureuses modifica­tions dans la fabrication du pain, et que le jour n'est pas éloigné où Caen n'aura rien à envier à Rouen à cet égard.
Nous pensons que ce résultat désirable serait surtout hâté par l'établissement d'un dépôt public ou halle à farines qui, tout en évitant de porter la moindre atteinte à la classe la moins aisée et la plus nombreuse des consom­mateurs, permît une appréciation plus large pour les pains blancs ou de choix, et donnât au boulanger le moyen de satisfaire aux exigences du consommateurdélicat. 
Alors le double but de perfectionnement et d'utilité publique que doit se proposer tout industriel conscien­cieux , sera rempli: moyen de nivellement pour le prix des blés, en établissant un débouché certain et régulier en temps d'abondance , et une ressource également facile en cas de nécessité d'importations; et amélioration sensible dans la nourriture première des populations, tant par l'épuration minutieuse que subissent les blés avant d'être réduits en farine, que par l'excellence des procédés de moulage et de farines.

Creully sur Seulles - Les "De Sillans de Creully" et l’abbaye de Saint Etienne de Caen

Il n'y avait pas longtemps que la ville de Rouen tout entière s'était émue, au récit d'un fait qui s'était passé dans l'enceinte même de l'abbaye de Saint Étienne de Caen. Le sieur de Guerville y avait été tué, en 1618, par Jean de Sillans, frère de Don François de Sillans, un des religieux les plus turbulents du monastère. Jean de Sillans allant visiter Don Antoine avec deux de ses amis, La Groudière et Sébastien Le More, y rencontra les sieurs de Coulombières et de Guerville. Ces derniers avaient précédemment fait maltraiter par leurs laquais un gentilhomme de ses amis, le sieur de Montplaisir. Ce fut le sujet d'une querelle, par suite de laquelle les uns et les autres mirent l'épée à la main. Le sieur de Guerville succomba dans la lutte. Des poursuites furent dirigées contre Jean de Sillans, et les puissantes familles de Coulombières et de Guerville parvinrent à empêcher qu'il n'obtint du roi des lettres de grâce.

Les armes des de Sillans 
On recourut en sa faveur au « privilège de la fierté ». On sait, que de temps immémorial, il avait été établi que le Parlement de Rouen serait tenu de délivrer, chaque année, un prisonnier élu par le chapitre de la cathédrale, auquel cette élection vaudrait grâce complète et absolue. Le prisonnier soulevait, en public, sur ses épaules, la châsse de saint Romain; il aidait à la porter processionnellement, le jour de la fête de l'Ascension, depuis la vieille tour où elle était déposée, jusqu'à la cathédrale, et cette cérémonie lui servait de lettres d'absolution.
Le chapitre de Rouen avait avec beaucoup de peine et sur la sollicitation du duc de Rohan et de Monseigneur de Briroy , évêque de Coutances, accordé à Jean de Sillans, coupable d'un meurtre commis dans une abbaye, la faveur de jouir de ce privilège. Au moment où la cérémonie allait s'accomplir, Jean de Sillans apprit que le Parlement n'avait voulu consentir à le délivrer que pour un jour, et que les parents de Guerville et de Coulombières se proposaient de l'enlever, à main armée, au milieu de la foule, pour le ramener dans sa prison. Il prit sur-le-champ son parti. Apercevant du haut du perron de la vieille tour où il se préparait à lever la fierté, un vide au milieu de la foule rassemblée sur la place, il en descendit rapidement les degrés, et se jeta au milieu de ses amis, qui, l'épée à la main, protégèrent sa fuite. Des lettres-patentes du roi confirmèrent l'élection faite par le chapitre de la cathédrale de Rouen et, pour éviter de nouveaux conflits, le dispensèrent de remplir les formalités prescrites par les ordonnances.
Un acte capitulaire de l'abbaye nous apprend que, le 13 juin 1620, Don Antoine de La Croix, prêtre, sacristain et prieur de Saint Laurent de Septvans, avait été offensé et outragé de plusieurs coups, « à sang et à plaie » , dans son jardin, par Don Jean de Cairon et Don Guillaume de Boulouche, en la présence de Don François de Sillans et de plusieurs personnes séculières, et entr'autres, des sieurs des Granges, de Banneville, Tanneguy et de maître Jean-Baptiste Le Mesle, sieur de La Cotte, huissier collecteur des finances, en la Généralité de Caen.
Don Antoine de La Croix avait porté plainte devant le lieutenant-criminel de Caen , « au préjudice de l'autorité, correction et discipline ecclésiastique et monastique ». Le chapitre évoqua la cause à son tribunal et contraignit le plaignant à retirer la requête par lui présentée à la justice séculière. Les faits qu'il avait dénoncés furent constatés, après une enquête, à laquelle procédèrent Don Jacques de Chefval, et Don Mathieu de la Dangie; et le chapitre prononça, que Don Jean de Cairon, « pour les dits excès et outrages par lui faits et commis, le dit jour de dimanche dernier, avant le sermon ou prédication ordinaire de l'abbaye, en la personne de Don Antoine de La Croix, avait encouru les censures de droit portées par le canon : Si quis suadenle. Il était en conséquence excommunié; et, pour expiation de la dite faute, ainsi par lui commise, condamné à tenir prison fermée, par le temps et espace d'un mois, et à jeûner au pain et à l'eau, aux jours de mercredi et vendredi. »

Les armes des de Sillans de Creully sur l’une des stalles de l’abbaye Saint Etienne de Caen 
Quant à Don Antoine de La Croix, le chapitre lui ordonna « de demander pardon à Dieu des jurements et des blasphèmes par lui proférés lors de ladite querelle, et il lui fut défendu de faire ni rendre à l'avenir telles plaintes criminelles, par devant le juge séculier, aux cas qui purement et simplement dépendaient de la discipline monastique, sur les peines au cas appartenantes.»
Don François de Sillans, qui n'avait figuré que comme témoin dans la scène dont il vient d'être question, et qui, en débarrassant Don de La Croix de ses deux assaillants, leur avait dit « que c'était trop de deux sur un », fut impliqué lui-même, quelques années après, dans une affaire bien plus grave, dont les circonstances sont consignées dans les actes capitulaires de l'abbaye. Deux femmes avaient été reçues dans le monastère par Don Marie, aumônier de l'abbaye, malgré les défenses si souvent réitérées. Au moment où elles étaient à dîner avec lui dans la maison qu'il occupait, Don François de Sillans et Jean de Cairon avaient escaladé le mur de son jardin, et, en jurant «mort Dieu! et sang Dieu!» s'étaient précipités dans ses appartements, devenus alors le théâtre de scènes dont il nous serait impossible de reproduire ici les détails. Ce que nous venons de faire connaître suffit pour compléter le tableau de cette triste période de notre histoire. Il prouve suffisamment jusqu'à quel point, en franchissant l'enceinte du cloître, pour se mêler à une société ardente et passionnée, les religieux en avaient contracté les habitudes violentes et les mœurs licencieuses.
Don François de Sillans vécut encore longtemps après ces événements. Nous trouvons, à la date du 5 janvier 1664, le testament dans lequel il témoigne un grand repentir pour ses fautes, à l'expiation desquelles il consacre une somme qu'il lègue à l'abbaye.